Nous réalisons une expertise et une estimation gratuite, sans engagement
Déplacement dans toute la france
Jean LURCAT
Qui était Jean LURCAT ?
Né le 1er juillet 1892 à Bruyères (Vosges). Mort le 6 janvier 1966 à Saint-Paul-de-Vence (Alpes-Maritimes). XX° siècle. Français. Peintre, peintre à la gouache, peintre de cartons de tapisseries, graveur, lithographe, illustrateur, céramiste. Tendance surréaliste.
Jean LURCAT dans le monde artistique
Après avoir commencé des études de médecine, il fut élève de Victor Prouvé à Nancy et du graveur et illustrateur Bernard Naudin. S’étant fixé à Paris en 1912, il ne fit qu’un bref passage à l’Ecole des Beaux-Arts, fréquentant l’Académie libre Colarossi. Il fonda la revue Les Feuilles de Mai, où collaborèrent Bourdelle, Elie Faure, Rilke, Ilya Ehrenburg. A la déclaration de la guerre de 1914-1918, il fut mobilisé pour cinq ans, mais ayant écrit des poèmes et des articles antimilitaristes, qu’il publiait dans des journaux étrangers, il fit un peu de prison, avant d’être blessé et réformé en 1917. Après la guerre, il effectua de nombreux voyages : 1919 Allemagne, Sicile, Autriche, Espagne; 1924 Espagne, Sahara; 1926 Grèce, Asie-mineure, Italie ; 1927 Espagne ; 1928 Sahara, Grèce, Etats-Unis. A partir de 1920, à Paris, il exposa ses peintures aux Salons des Indépendants et des Tuileries.
Style(s), technique(s) et oeuvres de Jean LURCAT
Après 1920, il fréquenta intimement les cercles surréalistes. Parallèlement à son oeuvre peint, il poursuivait sa réflexion et expérimentation sur la rénovation de la tapisserie, au début avec des moyens artisanaux. Vers 1937, l’industriel François Tabard lui proposa de faire réaliser ses cartons dans son usine d’Aubusson. Ce ne fut qu’en 1938 qu’il eut contact avec L’Apocalypse d’Angers, y trouvant l’entière confirmation de tout ce qu’il pensait sur l’histoire et la technique de cet art. Il remarqua qu’elle n’était tissée que d’une vingtaine de couleurs. A partir de cette découverte, il élabora la technique simplifiée du « gros point » et d’aplats des quelques « grands tons », relativement rapide et donc moins coûteuse, antérieure à la décadence de cette technique qui, avec le petit point et les tons fragiles apparus au XVII° siècle dans les manufactures des Gobelins ou de Beauvais, ambitionnait l’imitation de la peinture. Lurçat visait à habiller le mur de béton moderne de tapisseries décoratives, alliant la franchise archaïque de ce moyen d’expression médiéval à des conceptions plastiques et poétiques actuelles. La technique spécifique ainsi redéfinie conditionnant l’image à ses impératifs, ce n’était plus l’image préétablie par une peinture qui subordonnait la technique, il s’agissait donc d’un art à part entière et non plus d’un art appliqué. L’extrême limitation des moyens, conception et tissage par aplats, peu de coloration des laines, permettait en outre de livrer au lissier des cartons dessinés au trait, les couleurs des aplats indiquées par des numéros, donc une programmation facile à exécuter. En 1940, avec Gromaire et Dubreil, il se fixa à Aubusson, entreprenant de réorganiser à la base l’industrie de la tapisserie haute-lisse. En 1945, fut fondée l’Association des Peintres-cartonniers de Tapisseries. Ses expositions personnelles se multiplièrent à Paris à partir de 1952 jusqu’à sa mort. Des expositions posthumes lui furent consacrées : en 1976 Paris, 1981 Aubusson, 1982 Clermont-Ferrand, 1983 Marcq-en-Baroeul.
Peignant des petits tableaux influencés par le cubisme, qu’il appelait ses « poèmes de poche », dès 1913 il s’intéressa au problème de l’art mural, qu’il aborda alors par la fresque, en tant que collaborateur J.-P. Laffite. Ce fut à partir de 1915 qu’il commença à songer à une renaissance de la tapisserie, effectuant alors quelques canevas grossiers, réalisés à l’aiguille par sa mère. Toutefois, de 1919 à 1936, il fut surtout peintre. De ses amitiés surréalistes, il conserva toujours une source d’inspiration, plus de ce qu’on peut appeler l’imagerie surréaliste que des processus de création automatiques. A ce titre, il a illustré A la dérive et Corps perdu de Phillipe Soupault, Les Limbes de Charles Albert Cingria, et écrivit lui même le texte qu’il illustra de Toupies et Baroques. A cette source s’ajoutaient les influences du cubisme et de Matisse. Le souvenir des impressions reçues devant les étendues désertiques vues au cours de ses voyages en Espagne, Afrique du Nord, Grèce et Asie-mineure, vint ajouter une autre dimension à l’influence antérieure du surréalisme ; désormais apparurent très souvent dans ses oeuvres peintes des paysages arides et pierreux, rythmés de quelques ruines, où errent de rares êtres écrasés de solitude. En 1927, il réalisa le carton de tapisserie de 20 mètres carrés, cette fois tissé en basse-lisse, L’Orage. A partir de 1930, à la suite d’un séjour à Arcachon, furent introduits dans sa peinture des sujets maritimes, inspirés par un chantier naval, puis par le paysage côtier du Cap Ferrat. En 1936, il réalisa la tapisserie des Illusions d’Icare (au Palais Royal de La Haye); créant ensuite, au fil des étapes de sa recherche, ce style si particulier qui fait reconnaître ses tapisseries à coup sûr. D’entre le millier de cartons de tapisseries qu’il fit tisser, on peut essayer d’en citer quelques jalons : 1939 Les Quatre saisons; 1943 Liberté sur le poème de Paul Eluard ; 1948 L’Apocalypse de l’église d’Assy, mesurant 56 mètres carrés ; 1954 L’Hommage aux morts de la Résistance et de la Déportation ; 1957-1964 Le Chant du monde, immense ensemble de 500 mètres carrés, dont le tissage ne fut achevé qu’après sa mort, et qui fut exposé, inachevé dès 1964, dans de très nombreux musées et lieux publics avant son acquisition par le Musée de la Tapisserie d’Angers, inauguré en 1986 avec une exposition de l’ensemble de son oeuvre; et encore une tapisserie de 50 mètres carrés pour le Musée du Vin à Beaune ; une autre de 70 mètres carrés pour le Palais de l’Europe à Strasbourg; etc. Dans ces années d’intense production de tapisseries, il continuait de peindre des gouaches, illustrait : en 1948 La Création du monde d’André de Richaud, la Géographie animale sur des poèmes dont il était l’auteur; en 1950 Le Monde merveilleux des insectes d’après J. H. Fabre, Le Bestiaire Fabuleux sur des poèmes de Patrice de La Tour du Pin, et, artiste complet, s’il avait auparavant aussi conçu des décors de théâtre, il continuait de créer de nombreuses décorations murales et des poteries en céramique, des prototypes de mobilier.
Outre sa production picturale, dont les décors, le climat psychologique, sont indépendants de ceux de ses oeuvres tissées, et ses activités diversifiées, le style de Lurçat est fait, bien sûr en ce qui concerne les tapisseries, de cette technique directe et franche qu’il avait rénovée, mais aussi naturellement de son propre univers poétique, où coqs flamboyants et soleils multicolores et incandescents règnent sur des fonds de forêts d’automne ou de voûtes célestes aux éclats d’arbres de Noël. Grande figure incontestée de ce renouveau de la tapisserie, l’influence de Lurçat fut vive dans le monde entier, spécialement sur le groupe de Tournai en Belgique, et en France sur le groupe de « La Demeure », les Saint-Saens, Wogenscki, Tourlière, Prassinos et autres, même s’ils s’en dégagèrent dans la suite de leur propre évolution. Quant à ce renouveau de la tapisserie sous son impulsion, on peut éventuellement regretter deux choses : d’abord que l’influence du style prégnant de Lurçat ait sans doute conditionné celui de la plupart des artistes qui le suivirent tôt dans cette technique, influence à laquelle échappèrent d’autres venus plus tard comme Huguette Arthur-Bertrand, et surtout, dans le contexte social de notre temps, où le client de l’artiste est de moins en moins l’Eglise ou l’Etat, mais des particuliers qui attendent avant tout des oeuvres qu’ils achètent cher, qu’elles apportent repos, contemplation, harmonie, agrément, luxe, que ces peintres-cartonniers soient liés dans leurs possibilités d’expression et condamnés à oeuvrer dans le beau et le luxueux, ce qui n’est nullement répréhensible en soi, mais tout de même restrictif, ce qui risque d’accentuer le risque de caractère bourgeois qui a souvent menacé, au cours des âges, l’art français séduit par les conforts.